LES GROUPES

Dans la mascarade du quartier, il y a ces êtres émerveillés par les tonalités de l’univers. Ils ne sont jamais sortis de cette ruelle, de ces cinq maisonnées. Ils survivent, échappent aux promesses sadiques des implacables, aident les vauriens. Les innocents ouvrent leurs prunelles mordorées, séchées de ces larmes compatissantes pour leur voisin, ils tendent la main sans s’inquiéter d’un éventuel retour de grâce. Au loin, on les convoite, de l’autre côté on les jalouse, jamais ils ne laissent indifférent, c’est qu’ils ont de la ressource. Malgré les échappés malheureuses, les cruelles destinées, les mélancolies sacrées, ils se relèvent, la tête dressée vers le cosmos azuré.

Vauriens, vauriens, incapables, entendent-ils chantonner à longueur de siècle. Vauriens, vauriens, tu ne feras rien ! Ames perdues dans l’amer d’une destinée féroce, ils ont cessé l’action, ils ont stoppé la bataille pour conquérir l’objet des désirs. Désemparés, assoiffés de cette terre mortelle, se sentant maudits par leur immortalité. Ils répètent, inlassablement, ils répètent erreur et profanation. Parfois, la haine s’égare au chamarrant, cet organe encore battant faiblement. Parfois, ils hurlent, de rage et de colère. Mais tout le temps ils s’isolent, rejoignent leur similaire, ces mêmes vauriens hantant les murs de ces bâtisses colériques. Ils portent l’injustice dans leur orbe vengeresses, seulement ils ne font rien, rien de moins que de bailler aux corneilles.

Ils se parent d’orgueil ces rois et reines dominants entre les cloisons. Stratèges, doués, rusés, depuis des millénaires, ils parviennent à engoncer la gloire, à contraindre le fatum. Charmants peut-être pour mieux subvenir à leur besoin, ils revêtent la peau de l’âne printanier, un sourire gigantesque masquant les agates enflammées. Ils jouent, chat piégeant oiselles, agneaux, souris entre leurs pattes engrossées. Ils ne s’intéressent pas à l’humanité vibrante, la magie innocente, ils s’en emparent pour mieux la dévorer. Implacable séducteur ou monstrueux manipulateurs, incroyables ogres sirupeux, ils se lèchent leurs babines ensanglantées pour réduire les opposant à leur bonheur..